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Pour la sauvegarde des fumoirs de l’île Verte

durée 1 juillet 2024 | 06h56
  • Marc-Antoine Paquin
    Par Marc-Antoine Paquin

    Journaliste

    L’île Verte est connue pour son phare historique, son Musée du squelette, sa tranquillité et ses paysages à couper le souffle, mais qui y a déjà mis les pieds sait que le territoire est aussi parsemé de plusieurs fumoirs traditionnels. De véritables témoins d’une époque passée où la conservation des pêches était primordiale. Des infrastructures historiques dont certaines se retrouvent aujourd’hui dans un «état critique» et qui forcent les propriétaires et les citoyens du milieu à emboiter le pas pour les sauvegarder.

    Depuis quelques mois, un bel élan se développe au sein de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs pour la sauvegarde de 12 fumoirs patrimoniaux. La Corporation des propriétaires de l’île pour la conservation de l’île Verte (CPICIV) ouvre d’ailleurs la voie avec un projet communautaire nommé «Sauvons nos fumoirs», réalisé avec différents partenaires, dont la Municipalité et le Regroupement pour la pérennité de l'île Verte.

    Les objectifs sont ambitieux, mais ils sont aussi très clairs : assurer la préservation de «ces joyeux culturels» dont la valeur patrimoniale est parfois «exceptionnelle», tout en contribuant au développement touristique et culturel de l’île.

    «Après le phare, l’image symbolique de l’île, c’est les fumoirs», souligne Gilbert Delage, président de l’organisme sans but lucratif fondé en 1989. «Au cœur de l’identité collective de l’île, ils témoignent d'une tradition séculaire de transformation du poisson et de préservation
    des saveurs uniques régionales.»

    «Ils constituent aussi un patrimoine pour l’ensemble du Québec, pas seulement pour l’île Verte.»

    DEUX PHASES

    Le projet élaboré vise la mise en place d’un programme d’aide financière permettant d’appuyer les propriétaires dans la restauration de leur fumoir respectif. Il prévoit également la restauration d’un fumoir ancien qui servira de lieu de médiation culturelle, près de l’École Michaud. On compte, en outre, documenter et diffuser la façon de procéder au fumage du hareng et d’autres poissons.

    Au total, la CPICIV estime les investissements nécessaires à environ 177 000 $ pour les 2 phases du projet. Un montant qui, bien qu’il devrait être épongé par différentes subventions gouvernementales et régionales, demeure considérable.

    «Pour les restaurations elles-mêmes, une somme de 50 000 $ sera réservée pour aider les propriétaires. La CPICIV contribuera à la hauteur de 20 000 $ et le reste proviendra d’un programme de subvention du ministère de la Culture et des Communications dont la Municipalité gérera l’attribution», a détaillé M. Delage.

    «Les propriétaires qui feront une demande auront accès à un certain montant établi selon différents critères. La subvention couvrira une partie des frais de matériaux et de main d’œuvre, mais ils devront assumer le reste.»

    UNE VALEUR RECONNUE

    L’initiative de la CPICIV a été lancée à l’approche du 150e anniversaire de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs et à la suite de la réception d’une étude réalisée par Pascal Létourneau, un architecte spécialisé en conservation patrimoniale pour la firme DFS Inc., à l’été 2023. Le document de 84 pages, rédigé de façon pro bono, revient brièvement sur l’histoire de la fumaison sur l’île.

    Il présente aussi une fiche technique et très détaillée de chacun des 12 fumoirs patrimoniaux, décrivant leurs conditions existantes et fournissant les recommandations d’intervention.

    Les fumoirs, identifiés par des numéros – les mêmes utilisés par l’auteure Charlotte Gingras dans son livre «Les Boucaneries» –, sont aussi classés selon leur valeur patrimoniale respective, leur histoire, leur année de construction, leur intégrité et leur contribution aux valeurs paysagères de l’île Verte. Parmi les 12 fumoirs ciblés, 4 ont une valeur patrimoniale «exceptionnelle», 6 ont une valeur «élevée» et 2 ont une valeur «significative» ou «faible».

    La moitié de ces fumoirs est dans un état de détérioration «avancée» à un état «critique». Le quart des fumoirs est dans un état «passable» et l’autre quart en «bon état».

    «La valeur patrimoniale de ces fumoirs réside dans le savoir-faire traditionnel des verdoyants qui s’est transmis de génération en génération et les fumoirs en sont le témoin et la matérialisation concrète ainsi que la mémoire vive du patrimoine agricole bâti de la région», écrit Pascal Létourneau dans le document remis à la CPICIV.

    «Les fumoirs de l’île Verte consistent en un témoignage historique significatif et un héritag ethnologique et culturel de la plus haute importance patrimoniale que sont la pêche à la fascine et le fumage du poisson», ajoute-t-il.

    PROPRIÉTAIRES ET «GARDIENS»

    Geneviève Boudreault et Matthieu Huck font partie des propriétaires d’un fumoir de l’île. Le couple, qui habite une propriété du Bout-d'en haut depuis plus de deux ans, possède l’un des fumoirs les plus petits du territoire insulaire, selon l’étude. Ils se sont d’ailleurs identifiés dès l’achat comme les «gardiens» de ce savoir-faire ancestral.

    L’amour du couple pour le patrimoine et l’histoire ne date pas d’hier. Avant leur déménagement sur l’île, ils ont développé le projet L'Arbre et la Rivière à travers lequel ils ont partagé leur talent comme artisans-potiers. Ils ont toujours été engagés, d’un point de vue patrimonial, dans leur démarche artistique, notamment par l’utilisation de la cuisson au feu de bois.

    «On arrive ici avec une conscience que ce fumoir-là illustre le génie et la débrouillardise des
    gens d’autrefois. C’est une succession d’essais erreurs qu’ils ont dû faire pour arriver à ce
    modèle qui leur permettait de grimper pour installer les petites baguettes et les poissons», a
    souligné Mme Boudreault.

    «Contribuer à sa sauvegarde, c’est émouvant et c’est cohérent avec le devoir de mémoire dans lequel on aime s’engager, Matthieu et moi.» Selon l’étude, leur fumoir possède toutes les caractéristiques architecturales typiques des fumoirs traditionnels de l’île avec son faite ventilé, son revêtement en bardeaux de cèdre, sa structure de bois simple et ses barotins.

    L’infrastructure a fait l’objet d’une restauration exemplaire en 2013 et les caractéristiques architecturales essentielles du fumoir ont été préservées. À l’époque, un programme d’aide avait aussi été rendu disponible. Cette situation fait en sorte que le fumoir est en bon état aujourd’hui, bien que des travaux jugés mineurs doivent être entrepris, notamment à la porte et aux fondations.

    Selon Gilbert Delage, les propriétaires de l’île Verte, à l’image du couple, comprennent bien la valeur de ces témoins d’une autre époque. Ceux et celles qui possèdent un fumoir ont tous accepté d’embarquer dans le projet, même si plusieurs milliers de dollars sont en jeu et que les fumoirs sont aujourd’hui inutilisés. Malgré tout, la majorité ne pourra pas y arriver seule et c’est aussi pourquoi le programme d’aide est si important.

    CAMPAGNE DE FINANCEMENT

    Une campagne de sociofinancement, «ouverte à tous les amoureux du patrimoine québécois», a été lancée afin d’assurer la préservation de ces fumoirs emblématiques. La campagne comprend une série d'activités pour sensibiliser et mobiliser la communauté. Parmi celles-ci, des conférences, le lancement de la vente de chandails, une marche communautaire symbolisant l’engagement à protéger le patrimoine, etc.

    Les dons sont acceptés par virement Interac à [email protected] et à travers le site www.gofundme.com/Restauration-fumoirs.

     

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