Vivre avec la SLA
Rivière-du-Loup - La sclérose latérale amyotrophique (SLA) était jusqu’à tout récemment une maladie méconnue du grand public. Était, car depuis le 10 août dernier, elle est sur toutes les lèvres. La faute au défi du seau d’eau, le « Ice Bucket Challenge ». Pour Dany Plourde, homme d’affaires louperivois et atteint de la SLA, c’est bien plus qu’une histoire d’eau glacée.
C’est en septembre dernier que Dany Plourde a reçu son diagnostic. Le neurologue n’a pas mis de gants blancs. « Il m’a dit : «Tu as la SLA». Le ice bucket challenge, c’est ça. Une douche d’eau froide que tu reçois quand tu apprends que tu en es atteint. »
Il y a trois ans, l’homme d’affaires avait déjà reçu un diagnostic de sclérose latérale primitive, mais les résultats d’un test annuel ont été sans appel. Le verdict est terrifiant. « On m’a expliqué qu’il me restait entre trois et huit ans à vivre », laisse-t-il tomber.
Père de deux garçons, Dany Plourde ne se fait pas d’histoires. « Je n’aurai pas le temps d’être vieux, de prendre une retraite dorée. Mais je ne vais pas rester chez moi à me morfondre. J’ai encore un peu de temps. »
VERSION LENTE DE LA MALADIE
S’il a fallu près de deux ans à la médecine afin de déterminer qu’il souffrait de la SLA, c’est qu’il est atteint d’une version lente de la maladie. Cette dernière affecte actuellement les motoneurones supérieurs de son organisme. « Dans ma malchance, j’ai eu celle qui me donne un peu de temps. J’ai une perte de force, principalement du côté droit, mais je peux continuer à travailler, même s’il m’arrive de ne pas être capable d’ouvrir une simple bouteille d’eau. »
Il souligne qu’il ne ressent aucune douleur. « Je n’ai pas mal, ce n’est pas douloureux. Mais le corps commence à lâcher alors que l’esprit est intact. Quand on me dit de changer ma canne pour un modèle à quatre pieds, je refuse. Pour moi, c’est une étape, une étape de plus. Je ne suis pas pressé… »
C’est ainsi qu’au printemps dernier, malgré une santé fragilisée, une mobilité plus réduite, il s’est porté acquéreur du restaurant le Hublot à la Pointe de Rivière-du-Loup. « Je l’ai acheté en me disant que ça pourrait devenir une école pour mes deux gars. Une école en gestion de commerces, mais aussi, parce que ça me tient actif. Le weekend mes amis font quoi? Ils jouent au golf, au hockey, au soccer. Alors moi je viens ici. Je reste actif. Je n’ai pris qu’une seule journée de congé, le jour de ma fête. »
L’AVENIR
Il n’existe aucune cure à la SLA, et un seul médicament sensé ralentir la progression de la maladie est disponible. « On gagne environ trois mois… Comme ma progression est un peu plus lente, j’espère une option prolongée», souligne sourire en coin M. Plourde.
La SLA est une maladie dégénérative. Avec une espérance de vie annoncée de trois à huit ans, comment affronter la vie, comment se préparer… à ce qui s’en vient? « Je suis allé voir une fois sur Internet, ça fait peur. Les images de gens atteints et avancés dans la maladie, paralysés, intubés, oui, ça fait peur. Alors j’évite. Je vais chercher l’information, mais je ne regarde plus les images. »
S’il apprécie le « ice bucket challenge » et la participation de nombreux internautes de partout dans le monde, Dany Plourde admet que la dernière semaine a été plus éprouvante. « Là j’en parle… je ne l’avais jamais fait avant. On en parle et on en voit plus. »
Après une pause, l’émotion étant à fleur de peau, il l’admet d’emblée. « Ç’a été plus dur. Les journaux, la télé, j’ai travaillé toute la fin de semaine. Pourquoi j’en parle aujourd’hui ? Pour démontrer aux gens d’ici que ce n’est pas une maladie exotique ou lointaine. Il y en a ici. Je ne suis pas le seul. »
ICE BUCKET CHALLENGE
Et comment perçoit-il tous ces vidéos de gens se versant de l’eau glacée sur la tête? « Très bien », répond-il sans hésitation. Ça fait connaitre la maladie. Avant, quand je disais SLA, les gens n’avaient aucune idée, maintenant, ils le savent. En ce sens, le «ice bucket challenge», avec l’argent amassé, c’est très positif, inespéré même. »
Les retombées sont bien réelles. Selon ce que rapportait le quotidien La Presse ce week-end, plus de 5 000 personnes ont donné en ligne à la Société de la SLA du Québec. Une somme de plus de 223 000 $ a été amassée, soit trois fois plus qu’à pareille date l’an dernier.
Pour Dany Plourde, qui souligne vivre un jour à la fois, les retombées n’auront pas d’impact de son vivant. Mais il ne s’en formalise pas. « Pour moi, je ne profiterai pas de ces impacts sur la recherche, mais d’autres oui. »
PASSER «GO»
Et lorsque la fin est abordée, le jour où, comme il le dit lui-même, il « passera go », il affronte la question avec le même aplomb. « Oui, j’ai déjà pensé au suicide assisté. Quand je serai paralysé, incapable de respirer par moi-même, mais totalement lucide, est-ce qu’il ne vaudrait pas mieux me laisser partir? Alors oui, j’ai envisagé cet aspect. »
Et parce que le monde n’arrête pas de tourner, Dany Plourde est retourné à ses affaires. Ce dernier possède la Boutique Érotika, le restaurant le Hublot, Gravures et trophées des vainqueurs, sans oublier son implication dans le hockey mineur, notamment à la présidence des tournois pee-wee, bantam et midget de Rivière-du-Loup.
Il serait faux de croire que la force d’un homme se limite à puissance de ses biceps ou à la solidité de ses jambes. En ce sens, Dany Plourde rivalise bien avec tous les Hugo Girard et autres hommes forts de ce monde.
24 commentaires
"Il serait faux de croire que la force d’un homme se limite à puissance de ses biceps ou à la solidité de ses jambes. En ce sens, Dany Plourde rivalise bien avec tous les Hugo Girard et autres hommes forts de ce monde." Tout est dit.
Ton cousin, Karine et toute sa petite famille
Le but de cette campagne de sensibilisation est une levée de fond et de mieux connaître cette maladie. Pour des raisons personnelles je ne relève pas le défi mais je viens de donner en lisant cette nouvelle.
Bravo pour l'article et pourquoi pas ajouter le lien pour donner ?
http://sla-quebec.ca/donnez_le_don_individuel.php
Alain Gagnon Rivière-du-Loup