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Entre les mailles du filet de la Prestation canadienne d’urgence

durée 7 avril 2020 | 06h59
  • Andréanne Lebel
    Par Andréanne Lebel

    journaliste

    Bien que le premier ministre du Canada Justin Trudeau ait déclaré «on n’oubliera personne» en annonçant le 25 mars la mise en place de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) de 500 $ par semaine pendant 16 semaines, force est de constater que de nombreux travailleurs tombent dans les failles de cette aide financière et ne savent plus vers qui se tourner. C’est le cas notamment des artistes, des pompiers volontaires, des élus municipaux et des travailleurs autonomes.

    L’artiste multidisciplinaire Marilie Bilodeau de Trois-Pistoles a lancé un cri du cœur, puisqu’elle considère que les travailleurs de la culture sont oubliés de tous les paliers de gouvernement pour obtenir de l’aide financière pendant la pandémie. Les spectacles et les évènements culturels ont été parmi les premières annulations liées à la COVID-19 à la mi-mars.

    Avant la crise, Marilie Bilodeau tirait un revenu notamment de contrats d’animation dans les garderies, les écoles primaires et les résidences de personnes âgées et de maquillage pour enfants. Elle remplissait aussi des contrats à la leçon dans différents établissements de la commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs en tant qu’artiste multidisciplinaire. «C’est un gros casse-tête, mais je réussis à vivre en faisant des choses un peu partout dans le domaine évènementiel, je ne suis pas la seule», résume-t-elle. À la demande du gouvernement du Québec, la commission scolaire honore tous ses contrats, ce qui lui procure un montant de 170 $ par semaine.

    L’artiste de Trois-Pistoles ne peut donc pas bénéficier de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) puisqu’elle touche toujours un revenu, elle n’est pas non plus admissible aux critères de l’aide sociale ou au chômage et elle n’a pas été en contact avec le virus ou voyagé, selon le programme d’aide provincial.

    Marilie Bilodeau a donc écrit à son député fédéral, au gouvernement provincial, aux ressources humaines de la commission scolaire pour être mise à pied temporairement, mais elle n’a trouvé que des réponses négatives. «Je ne pense pas que les paliers de gouvernement sont mal intentionnés, mais ils ont mis des critères stricts qui font en sorte qu’on tombe dans les failles des différents programmes», ajoute-t-elle. Plusieurs artistes de la région et travailleurs autonomes se trouvent aussi dans une situation semblable. Mme Bilodeau ne peut pas se porter volontaire pour aller travailler dans l’un des services essentiels du gouvernement puisqu’elle doit garder sa fille en bas âge.

    «Mars, avril et mai, ce sont mes plus gros mois de contrats, avec cet été. Les spectacles sont les premières choses qui ont été annulées avec la crise. Il faut s’unir pour essayer de se faire entendre. J’ai foi qu’on va être entendu. On nous dit d’attendre, mais c’est stressant, il y a toujours le premier du mois qui s’en vient. Je veux que ceux qui sont dans ma situation se reconnaissent et leur dire qu’ils ne sont pas seuls».

    SERVICES INCENDIE ET MUNICIPAUX

    Les pompiers volontaires et les conseillers des plus petites municipalités du territoire vivent une situation similaire et tombent eux aussi dans les failles des critères de la Prestation canadienne d’urgence. Ils ne peuvent toucher les 500 $ par semaine pendant 16 semaines de la PCU du gouvernement fédéral parce qu’ils gagnent toujours un faible revenu lié à leurs fonctions. L’un des critères pour être éligible au PCU est de n’avoir obtenu aucun revenu pendant une période de 14 jours, ce qui n’est pas leur cas.

    Ces sommes ne leur permettent toutefois pas de gagner un salaire assez élevé pour subvenir à leurs besoins. Une situation qui a été discutée à la Table régionale des élus du Bas-Saint-Laurent, selon le préfet de la MRC de Rivière-du-Loup, Michel Lagacé. Pour lui, il est primordial que ces employés puissent rester en poste en ce temps de crise.

    Il affirme avoir eu un accueil positif de la part du gouvernement fédéral, mais il se dit toujours en attente d’une confirmation. «Certains remettent en question leur implication, parce qu’ils renoncent pendant ce temps à une prestation de 2 000 $ par mois. Qu’est-ce qui va se passer d’ici le mois de juin? Je pense qu’il va y avoir d’autres mesures mises en place. J’ai peur qu’on assiste à des démissions importantes. Les conseils municipaux doivent être fonctionnels pour gérer la crise et les pompiers, on n’en a pas de trop. Nous avons aussi besoin de nos services d’urgence dans nos municipalités», complète M. Lagacé.

    Le directeur du Service de sécurité incendie de Témiscouata-sur-le-Lac, Gérald Dubé, compte sur une équipe de 29 pompiers volontaires pour répondre aux appels d’urgence. Certains ont envisagé de rester chez eux pour avoir un revenu décent pour vivre. Pour le moment, un seul a confirmé sa décision et ne se rend plus sur les interventions, finances obligent. «C’est sûr que ça prend tous les éléments de notre équipe pour bien faire notre travail. On fait attention pour respecter le deux mètres entre nous, on désinfecte les camions. S’il me manque trois pompiers, ça ne marche plus dans la caserne. On attend la réponse bientôt, si cela peut en aider aussi dans d’autres municipalités», complète M. Dubé.

    RÉACTIONS POLITIQUES

    Le premier ministre du Canada Justin Trudeau a annoncé son intention, lundi, d'élargir les critères d'admissibilité de la PCU aux Canadiens qui continuent de travailler, malgré des heures réduites en lien avec la COVID-19. Les pompiers volontaires ou à temps partiel sont visés par cette mesure, selon la ministre Chrystia Freeland. Rien de concret n'a toutefois encore été proposé. 

    Le député de Montmagny-L’Islet-Kamouraska-Rivière-du-Loup, Bernard Généreux, n’a pas mâché ses mots envers le gouvernement mené par Justin Trudeau. «Le premier ministre a dit qu’il n’oublierait personne et à venir jusqu’à maintenant, il a oublié beaucoup de monde. Il y a une pression des partis d’opposition pour faire reconnaitre les pompiers, les élus et ceux qui travaillent en évènementiel. Ça ne fait aucun sens. Le gouvernement aurait pu choisir d’autres voies et passer par les entreprises, par exemple. On laisse tomber tout un pan de travailleurs à temps partiel qui sont éliminés, c’est complètement ridicule (…) On fait notre travail d’opposition et on exige des comptes», a déclaré M. Généreux. Ce dernier pense toutefois que des correctifs seront apportés au cours des prochains jours puisque la pression provient de toutes parts, tant de l’opposition qu’au sein du Parti libéral. Il déplore aussi que la PCU vienne par la bande désapprouver le travail à temps partiel, alors que c’est la réalité de bien des travailleurs au Canada.

    «Je dis aux gens d’être patients et de ne pas aller trop vite pour prendre des décisions. Des rétroactivités vont se faire à partir du 15 mars, comme les autres programmes qui ont été annoncés», ajoute-t-il. L’équipe du bureau du député conservateur est débordée d’appels et tente de répondre aux interrogations des citoyens qui ont des situations particulières et ignorent s’ils se qualifient pour la PCU ou toute autres aide financière.

    «Ça met beaucoup de monde dans l’incertitude et c’est de plus en plus difficile. Il n’y a pas d’argent qui arrive rapidement. La priorité pour le moment, c’est qu’il ne sorte pas d’argent du compte en banque, pour le plus longtemps possible. Il faut être extrêmement responsable dans ses dépenses». Deux solutions s’offrent aux entrepreneurs : mettre tout le monde à pied pour qu’ils bénéficient de la PCU, ou encore conserver le lien d’emploi avec une aide financière couvrant 75 % des salaires. Le député fédéral Bernard Généreux a résumé sa pensée avec une citation d’une chanson de Félix Leclerc : «La meilleure façon de tuer un homme, c’est de le payer à ne rien faire.»

    Le député de Rimouski-Neigette-Témiscouata-Les Basques Maxime Blanchette-Joncas a lui aussi reçu beaucoup de messages de citoyens qui n’entrent pas dans les critères de la PCU. «L’équipe du Bloc québécois a répertorié à de multiples reprises des situations problématiques concernant les pompiers volontaires et les élus. Le président du Conseil du Trésor Jean-Yves Duclos a dit vendredi dernier aux pompiers de continuer de faire leur travail, qu’on allait s’occuper d’eux. C’est une question de sécurité publique et cela affecte l’ensemble des municipalités et des MRC. Les municipalités ont aussi besoin de gens pour coordonner les diverses actions en lien avec la COVID-19», ajoute M. Blanchette-Joncas.

    Aucune annonce concrète de la part du gouvernement fédéral n’a encore eu lieu concernant ces deux corps de métiers. «Les artistes aussi, les contractuels, les travailleurs autonomes qui touchent des redevances, on a déjà interpelé le gouvernement parce qu’on ne veut pas oublier personne. Ils ont perdu leurs sources principales de revenus, il faut qu’on soit à l’écoute et sensible à cette situation. Il faut que le gouvernement démontre de l’ouverture et passe à l’action pour accommoder le plus de gens possible. Il y a beaucoup de cas par cas, chaque situation est unique», complète le député du Bloc québécois, Maxime Blanchette-Joncas.

    PRESTATION CANADIENNE D’URGENCE

    La Prestation canadienne d’urgence offre un soutien financier temporaire de 500 $ par semaine pour un maximum de 16 semaines pour les personnes qui ont cessé de travailler en raison de la COVID-19.

    La PCU est offerte aux travailleurs qui résident au Canada et qui ont 15 ans ou plus, ont cessé de travailler en raison de la COVID-19 et qui n’ont pas quitté leur emploi volontairement ou qui sont admissibles aux prestations régulières ou de maladie, ont gagné un revenu d’au moins 5000 $ en 2019 ou dans les 12 mois précédant leur demande, sont, ou prévoient être, sans revenu d’emploi ou de travail indépendant pendant 14 jours consécutifs au cours de la période initiale de quatre semaines. Pour les périodes de prestations suivantes, ils s’attendent à ne pas toucher de revenu d’emploi ou de travail indépendant.

     

    commentairesCommentaires

    1

    • SM
      Suzie Marcoux
      temps Il y a 4 ans
      Ceux qui ont perdu leur emploi avant la covid et ceux qui été malades sans avoir droit à l'assurance emploi et qui retournaient sur le marché du travail sont exclus de la pcu
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