Cela m’a fait penser qu’il y a un autre dessin de Massicotte qui se rapporte à cette fête : LA MESSE DE MINUIT AUX CHANTIERS. La voici :

Ceux qui sont nés avant 1950 ont probablement eu un père, un frère, un cousin, un voisin qui, l’automne venu, « montait dans le bois » pour y bûcher de quoi nourrir sa famille, acheter des semences, payer une dette…
Pas question alors de ces monstres mécaniques qui, aujourd’hui, rasent une forêt en quelques jours! Vous les avez vues à la télé, ces « débusqueuses » qui prennent un arbre en tenaille, le scient, le couchent à l’horizontale, l’ébranchent et le chargent sur un camion le temps de chanter un couplet de MON BEAU SAPIN?
Avant 1950-1960, pas question de ça! On coupait les arbres à la hache et au sciotte (certains disaient un « boxa » et les Français disent « une » sciotte). Parfois, quand le tronc était trop gros, il fallait se mettre à deux et prendre un godendard.
Certains bûcheux « revenaient au bord » pour les Fêtes. D’autres restaient au camp, épargnant le coût du voyage et ajoutant quelques journées d’ouvrage à leur maigre paie.

Pour ceux-là, parfois, un prêtre allait, en voiture à cheval ou en raquettes, dire la messe de Minuit. C’est qu’à l’époque, il n’y avait pas un prêtre pour plusieurs paroisses, mais plusieurs prêtres par paroisse : le curé, le vicaire, le deuxième vicaire, des fois le troisième vicaire…
Regardons le dessin de Massicotte. Ayons une pensée pour nos Anciens qui avaient froid, qui avaient les mains gercées, qui tournaient leur combinaison de laine afin que les poux les laissent tranquilles quelques heures… Et qui choisissaient de rester aux chantiers dans le temps des Fêtes afin de gagner un peu plus pour que nous autres, la génération suivante, puissions vivre un peu plus à l’aise.
Alfred Desrochers (le père de Clémence) écrivait :
« Je suis un fils déchu de race surhumaine »…
Je ne me sens pas déchu, juste différent. Mais pour que j’accède à cette différence, je me souviens qu’avant moi il a fallu, c’est bien vrai, une race surhumaine.