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Réflexions d'une louperivoise charlevoisienne

durée 8 mai 2019 | 10h06
Alex Ann Villeneuve Simard
duréeTemps de lecture 3 minutes
Par
Alex Ann Villeneuve Simard

Je suis née du côté des montagnes.

Celles que l’on voit d’ici. 

Celles qui servent de lit au soleil qui se couche.

Celles qui me rappellent que je reste une étrangère à Rivière-du-Loup.

 

Mon arbre généalogique vieillit de l’autre côté.

Les vagues et l’odeur saline me ramènent aux nombreuses marches que j’ai faites sur la grève à La Malbaie.

 

Je me suis souvent demandé c’était qui les gens de l’autre côté.

Je voyais les lumières des voitures rouler sur la 20.

Jamais je n’aurais pensé y habiter un jour.

Comme je n’aurais jamais pensé que le père de ma fille serait le « monsieur » des blocs-notes de CFTF.

Les blocs-notes… ça existe-tu encore sérieux?

 

Bref. C’est pas ça le sujet.

 

Je suis partie de Charlevoix à 17 ans.

Je n’y ressentais pas à ce moment-là tout le potentiel d’une floraison.

Je me sentais un peu frustrée qu’on cajole trop les touristes et pas suffisamment les gens de la place.

J’ai étiré mon élastique jusqu’à ce qu’il pète.

J’étais incapable de me faire l’esquisse de mon avenir.

C’est peut-être l’aube de ma vie d’adulte qui avait trop soif.

Bref, je ne suis pas restée.

Mais Charlevoix est encore en moi.

 

Quand je suis partie, j’y revenais toutes les fins de semaine, pour travailler pis repartir avec 3-4 lunchs préparés.

Une séparation progressive.

Les dimanches soirs, la région se vidait de sa jeunesse qui roulait vers la conquête de leur diplomation.

Nombreux étaient ceux qui aspiraient à se développer sur le « grand marché ».

Charlevoix ne deviendrait que le retour au bercail le temps d’une raclette de Noël ou d’un brunch de Pâques.

Les allers-retours au fil du temps s’estomperaient.

 

Ça reste un passage obligé : partir.

Découvrir autre chose, désapprendre pour réapprendre.

Juste pouvoir fumer des clopes sans se cacher.

Ne plus être la fille d’un tel.

 

Quand je reviens à La Malbaie, je sors prendre une bière à l’Auberge de Jeunesse.

Je sens le vent de fraîcheur qui pour une fois ne provient pas seulement du fleuve Saint-Laurent.

Je me demande parfois ce que je serais devenue si j’étais restée.

Je plonge alors dans une réflexion qui me ramène à mes propres racines.

On pourra toujours décider vers où nous allons.

On ne pourra jamais changer là où on vient.

Ma mère, ma grand-mère, mes tantes et mes oncles y sont toujours.

Des amis aussi.

Ça me fend le cœur de les voir vieillir loin de moi.

Quand j’y vais, je repars toujours en braillant.

 

Et pourtant, je n’ai pas l’intention d’y remettre les pieds.

Rivière-du-Loup m’a adoptée.

Ou l’inverse.

Mais le terme chez nous, je l’utilise autant pour ici que pour là-bas.

 

Maintenant, j’entends les jeunes louperivois parler et croire que leur avenir est ailleurs.

Je les entends dire d’ici ce que j’ai pu dire de chez nous.

Je les vois prendre la 20 tous les dimanches soirs pour aller « s’adulter » dans 'grand ville.

 

Faut-il nécessairement que le « partir » se transforme en « revenir »?

Faudrait-il étirer nos élastiques juste assez pour qu’ils nous ramènent avec un peu d’élan?

N’y a-t-il pas dans les étrangers un regard nouveau qui nourrit les natifs?

 

Je me demande juste combien de temps je continuerai de me sentir un peu étrangère à une ville que je choisis pourtant jour après jour.

Une ville qui sera le « chez nous » de ma fille.

Qui sera peut-être un jour celui de ma mère.

 

Parce que je pense que c’est ça qui me fend le plus le cœur.

De laisser les années filer sans pouvoir compter les rides qui s’ajoutent au visage de ma mère.

Parce que la vie, ce n’est pas seulement de travailler, c’est d’être auprès de ceux qu’on aime.

 

C’est le mois de mai.

Je me sens comme en plein « spleen » de novembre.

On peut mettre ça sur le dos des hormones, elles sont capables d’en prendre.

 

Racontez-moi d’où vous venez.

J’ai envie de lire vos histoires.

À bientôt

Bisous x

 

 

 

 

commentairesCommentaires

8

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  • AL
    Anne Lowe
    temps Il y a 4 ans
    Tu as tellement les bons mots pour exprimer votre cheminement qui vous amène ailleurs loin de nous . Le plus important dans tout ça c’est de trouver le bonheur le bien-être peut importe l’endroit. Comme on peut vous aimer xxxx
  • S
    Sébastien
    temps Il y a 4 ans
    Très beau texte et tellement vrai. D’un gars qui habite Québec depuis plus de 10 ans mais qui reste un gars de st-Fidèle.
  • L
    Louise
    temps Il y a 4 ans
    Très beau texte ma belle Alex Ann qui m'a fait versé une larme ! J'sais pas trop pourquoi 😄
  • LF
    Lisette Forgues
    temps Il y a 4 ans
    Ta plume est belle Alex et tu réussis à nous arracher des larmes. Je te souhaite une bonne fête des mères. Xxx
  • MJB
    Marie-Josée B.
    temps Il y a 4 ans
    Très beau texte! Les bons mots sur les sentiments qui nous habitent d ‘être Charlevoisien!
    J’ai quitté la région à 17 ans! Maintenant ma vie est dans ma région adoptive des Laurentides où je me sens encore étrangère! Le fleuve me manque et me ramène pour l’espace d’un moment, d’un week-end à mon essence! L’énergie du fleuve et le bien-être! Je suis une Charlevoisienne dans le coeur et l’âme!
  • SM
    Simard marlene
    temps Il y a 4 ans
    Magnifique texte ma belle Charlevoisienne de coeur et louperivoise de tête
    Xxxxxx
  • AA
    Alex Ann
    temps Il y a 4 ans
    Merci à vous chers lecteurs de me transmettre vos mots, vos impressions et vos bouts d'histoire. C'est un plaisir de vous lire, à bientôt!
  • CCB
    Constance Céline B.
    temps Il y a 4 ans
    Très chouette histoire.
    Merci.

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