Réseaux sociaux : une majorité numérique de 14 ans recommandée
La Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes, présidée par la députée Amélie Dionne, recommande au gouvernement d’instaurer une majorité numérique de 14 ans. Avant cet âge, il serait interdit de s’inscrire et d’avoir accès aux réseaux sociaux, sans le consentement d’un tuteur légal.
Voilà l’une des 56 recommandations faites par les membres de la Commission dans un rapport final déposé ce jeudi 29 mai à l’Assemblée nationale. Du nombre, on retrouve également l’interdiction des appareils mobiles personnels dans les écoles primaires et secondaires du Québec, laquelle avait été annoncée à la fin avril lors du dépôt d’un rapport intérimaire.
L’instauration d’une majorité numérique se révèle maintenant comme l’une des recommandations importantes du rapport qui s’intéresse à de vastes enjeux du monde numérique.
Les membres de la Commission rappellent que la majorité des réseaux sociaux ont mis en place un âge minimal pour l’ouverture d’un compte (13 ans sur les principales plateformes), mais que les jeunes parviennent à s’inscrire bien avant d’avoir atteint l’âge requis. Dans bien des cas, cela est fait avec l’autorisation des parents.
Ils soutiennent avoir constaté un certain intérêt pour cette mesure, notamment chez les spécialistes et organismes entendus en auditions.
«Ce seuil [de 14 ans] s’inscrit dans la lignée des mesures prises par d’autres États et des balises déjà établies dans le cadre législatif québécois», a soutenu Alexandre Leduc, député de Alexandre Leduc, membre du comité directeur de la Commission et député d’Hochelaga-Maisonneuve.
Le gouvernement, dit-il, doit mener une «analyse rigoureuse», dirigée par les principes de faisabilité et d’applicabilité, et qu’il doit entamer des travaux au sein des instances intergouvernementales et multilatérales dont le Québec est membre en vue d’inciter l’adoption d’une réglementation sur les plateformes numériques.
Les membres de la Commission ne cachent pas que cette mesure soulève plusieurs défis, notamment dans la mise en place d’un mécanisme de vérification d’âge. Or, cette recommandation - et l’adoption éventuelle d’une loi - envoie un message fort aux parents, estiment-ils.
«Ça envoie un signal de santé publique comme quoi c’est ça qui devrait être la norme. Ça envoie aussi un signal aux parents […] Ils ont un rôle à jouer», a renchéri M. Leduc.
La Commission recommande également une mise à jour des lois «afin que les plateformes numériques tiennent compte des risques pour la santé physique et mentale des personnes mineures en exigeant qu’elles respectent les principes de la vie privée dès la conception ou qu’elles adoptent des mécanismes de modération efficaces pour signaler ou bloquer les contenus violents, haineux, sexuels ou inappropriés».
Elle demande aussi «d’interdire les lots aléatoires payants et les microtransactions dans les jeux vidéo, la vente ou toute autre forme d’aliénation de renseignements personnels, ainsi que le profilage (publicités ciblées) des jeunes de moins de 14 ans».
PAS UNE DIABOLISATION DES ÉCRANS
Il est important de mentionner que la Commission ne vient pas diaboliser les écrans dans son rapport. Elle vise plutôt «une démarche conciliant prévention, sensibilisation et éducation».
«Les recommandations ont pour but de préserver un équilibre entre l’utilisation des écrans et le bien-être des jeunes. Dans l’objectif de développer un rapport sain au numérique, elles visent à sensibiliser et outiller les jeunes, mais également les parents et les grands-parents, de même que les personnes qui interviennent auprès des jeunes», précise le document.
Les parents, par exemple, sont invités à donner l’exemple et à décrocher de leurs écrans, mais aussi à proscrire les écrans des chambres à coucher, à limiter le temps d’écran et à ne pas utiliser les écrans pour calmer ou distraire les enfants.
Au contraire, les enfants doivent être distraits en «favorisant la pratique d’activités physiques, sportives, récréatives, sociales, culturelles et parascolaires».
Du côté scolaire, la Commission recommande que des directrices claires soient établies sur l’utilisation pédagogique des outils numériques et qu’ils ne soient pas utilisés comme récompense. Elle juge aussi essentielle que la notion de citoyenneté numérique soit incluse au code de vie des écoles afin de sensibiliser les élèves.
«Nos jeunes passent une grande partie de leur quotidien à l’école, il était donc essentiel de s’y attarder», a résumé le vice-président de la Commission, Enrico Ciccone.
Divers enjeux liés au temps d’écran, à la cyberintimidation, à l’accès des mineurs à la pornographie sur le Web, aux mécanismes visant à créer une dépendance et à la publicité destinée aux enfants sur les applications font également l’objet de recommandations.
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