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La Sainte-Trinité, la musique, et les bouleversements sociaux Pour Pierre Landry, écrire ce parcours sur papier était avant tout un devoir de mémoire. «C’était tellement un mouvement global de la jeunesse à ce moment. C’était naturel, comme une vague. On défaisait ce qui avait été fait avant», explique Pierre Landry. À travers les pages de son nouveau livre inti- tulé «Plume, Pierrot et moi. La véritable histoire de la Sainte-Trinité» et publié aux éditions du Septentrion, il raconte la formation de son groupe, la «Sainte-Trinité», à Percé. Ils ont fré- quenté la Maison du pêcheur, tout comme cer- tains acteurs felquistes impliqués dans la crise d’Octobre. «On n’était pas juste un groupe de chanson- niers, on était des contestataires, on y allait à planche», relate Pierre Landry. L’histoire de ce groupe de musique est selon lui indissociable du mouvement politique et social qui secouait le Québec à cette époque. «C’était plus global que le politique au sens strict. Il y avait une espèce de clivage entre le monde ‘’straight’’ et le monde marginal, parallèle. C’était l’époque des premiers cheveux longs, etc. Il y avait une certaine partie de la population qui en voulait à ces jeunes- là aux cheveux longs», raconte l’auteur. Plume Latraverse réagissait aux juge- ments de la société à travers ses chansons. Pierre Landry retient de cette époque un sentiment d’effervescence qui vient avec la jeunesse, une période créative faste, voire une folie totale, en plus du bon- heur d’avoir côtoyé le personnage de Plume Latraverse, avec qui il échange encore aujourd’hui. «Dans cette période-là, les choses étaient très perméables entre la gauche, le Front de libération du Québec (FLQ) et les artistes contestataires […] C’était un petit milieu, tu ne savais pas trop qui faisait quoi, il y avait beaucoup de sym- pathisants», précise Pierre Landry. La Sainte-Trinité a été qualifiée de «cel- lule Divertissement» de la crise d’Octobre. Pierre Landry se souvient que des bombes sautaient de façon quasi hebdomadaire dans les rues de Montréal lors de cette période. Le Front de libération du Québec, un mouvement indé- pendantiste, a commis entre 1963 et 1970 plus de 200 attentats à la bombe. Leurs actions, con- sidérées comme des actes terroristes, ont cul- miné en octobre 1970 avec les enlèvements du diplomate britannique James Cross et du vice- premier ministre québécois Pierre Laporte, qui a été assassiné. Ce meurtre a coupé les ailes du mouvement et l’opinion publique a complètement tourné. «La poussière retombe tellement rapidement sur les évènements. On perd la perspective parfois. Les jeunes n’ont pas connu cette période-là. Avec ce qui se passe dans la société actuellement, ça se peut qu’il y ait encore des bouleversements éven- tuellement», ajoute Pierre Landry. Il croit que la connaissance des faits historiques permet de mieux voir venir les crises qui se pointent à l’horizon. «Si la Révolution tranquille avait des chances de dégénérer en vraie révolution, c’est à ce moment-là que ça se serait passé», croit l’auteur. Dans son livre, Pierre Landry travestit les paroles d’une chanson du groupe Harmonium afin de bien résumer ce en quoi consistait le mouvement. «On a mis quelqu’un au monde, vous êtes mieux de l’écouter», auraient-ils pu chanter. Malgré que la société ait continué de progresser socialement, Pierre Landry est d’avis que les acquis sont toujours menacés. «Si l’éga- lité hommes-femmes, le droit de grève et la situation du français sont préservés, c’est parce que des gens se sont battus […] Il faut toujours rester vigilants. Il faut garder une conscience historique et sociale allu- mée. Il y a des forces dans la société qui vont toujours être prêtes à réprimer ces droits-là pour leur propre bien-être.» Le lancement de «Plume, Pierrot et moi. La véritable histoire de la Sainte-Trinité» se déroulera le vendredi 13 juin en formule 5 à 7 au Café culturel de la Pointe de Rivière-du-Loup. Pierre Landry a été rédacteur en chef du journal Le Mouton noir et il y écrit depuis 25 ans. Il a aussi été directeur général du Musée du Bas-Saint-Laurent à Rivière-du-Loup de 2007 à 2013. PAR ANDRÉANNE LEBEL > Un peu malgré lui, Pierre (Doc) Landry a été un témoin privilégié des bouleversements de la société québécoise dans les années 1970. En pleine crise d’Octobre, lui et ses acolytes Plume Latraverse et le poète Pierrot Léger se sont retrouvés au cœur de l’un des mouvements politiques les plus importants de l’histoire du Québec. Pierre Landry et sa nouvelle création. PHOTO : ANDRÉANNE LEBEL Pierre Landry et Plume Latraverse lors du lancement de l’album Triniterre. PHOTO : MONTRÉAL-MATIN, ARCHIVES DE PIERRE LANDRY 1153102425 | INFODIMANCHE Le 11 juin 2025 < 53 • CULTUREL
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