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Des paramédics à 60 kilomètres d’un enfant en arrêt cardiorespiratoire Dans la nuit du 2 janvier, la centrale d’urgence 911 a reçu un appel pour un enfant inconscient et en arrêt cardiorespiratoire à Esprit-Saint, une municipalité située à l’est de Lac-des-Aigles et qui est normalement couverte par une équipe de paramédics de Saint-Michel- du-Squatec. Or, c’est une ambulance de Témiscouata-sur- le-Lac (Cabano) qui a dû faire la route cette fois, puisque celle de Saint-Michel-du-Squatec avait déjà quitté le territoire pour effectuer un autre transport vers l’hôpital de Rimouski. Malgré l’urgence de la situation, les paramé- dics de la Coopérative des paramédics de Témiscouata ont ainsi été contraints de parcou- rir près de 60 kilomètres le plus rapidement pos- sible afin d’atteindre la jeune victime, puis un autre 55 kilomètres avant de rejoindre finale- ment l’hôpital de Rimouski. Un voyage intermi- nable pour un cas aussi grave. «C’est un délai énorme», a convenu Jacques Potvin, paramédic et président du Syndicat des paramédics du Bas-Saint-Laurent (FSSS-CSN). «Les paramédics veulent faire le plus vite possi- ble, mais sur la route 232, l’hiver, on ne peut pas rouler 200 km/h...» Selon nos informations, les paramédics ont été appelés pour une priorité 0, la plus impor- tante de la liste des priorités d’affectation, cette nuit-là. Une véritable course contre la mon- tre pour laquelle ils sont partis «avec deux pri- ses», a regretté le professionnel du milieu pré- hospitalier d’urgence. Une fois à Rimouski, l'enfant a par la suite été transféré dans un centre hospitalier de Québec où son décès a finalement été constaté. Selon Radio-Canada, celui-ci n’aurait pu être évité, puisqu’il a été victime d’un anévrisme au cerveau. Quoi qu’il en soit, Jacques Potvin rappelle que chaque minute compte lorsqu’une personne a besoin de soins médicaux. Une situation simi- laire, aussi grave, pourrait survenir la nuit pro- chaine, dans le même secteur, par exemple. «Quand il y a arrêt cardiorespiratoire, la vie est en danger et les 10 premières minutes sont très importantes. Les chances de survie baissent ensuite rapidement, plus le temps passe. Si des manœuvres de réanimation sont réalisées, le délai va s’étirer, mais il y a vraiment urgence, il faut agir», a expliqué M. Potvin. «On ne peut jamais garantir la survie d’une personne, mais il faut qu’elle ait les meilleures chances possible. Elle doit avoir accès aux soins qui peuvent faire la différence. Mais pour cela, une équipe doit être proche et doit pouvoir inter- venir plus rapidement», a-t-il ajouté. Jacques Potvin ne cache pas que les paramé- dics vivent un sentiment d’impuissance et de découragement lorsqu’ils sont confrontés à des situations comme celles-ci et qu’ils doivent rouler plus de 50 kilomètres alors que chaque minute compte. Les équipes de Cabano sont d'ailleurs souvent appelées à couvrir les territoires plus éloignés de Squatec et Rivière-Bleue, lorsque les paramédics de ces milieux quittent vers un cen- tre hospitalier. «L’équipe fait ce qu’elle doit faire. Elle monte le plus vite possible et elle fait son travail. Mais parfois, elle ne peut pas faire autrement que de penser que les choses pourraient se passer diffé- remment si elle était déplacée dans le secteur donné plus tôt.» «Les minutes supplémentaires qui sont néces- saires pour se rendre auprès de la victime dans une situation comme celle-là, elles comptent, elles ont un impact […] Il y a de la frustration par rapport à ça.» «IL FAUT QUE LES CHOSES CHANGENT» M. Potvin, qui travaille comme paramédic depuis plus de 20 ans, est catégorique : il estime que la présence d’horaires de faction au Témiscouata – et ailleurs – nuit à la possibilité d’un «déploiement dynamique» et stratégique des ambulances sur le territoire. Selon lui, dans un scénario idéal, l’ambulance de Cabano aurait dû être appelée à prendre la relève de celle de Squatec au départ de cette dernière vers Rimouski, le 2 janvier. Celle de Notre-Dame-du-Lac aurait pu ensuite se posi- tionner pour couvrir efficacement le territoire de Témiscouata-sur-le-Lac en entier. Mais cela était impossible, puisque la seule équipe de paramédics de Notre-Dame-du-Lac, la nuit, est sur un horaire de faction. Elle devait attendre un appel à la maison, elle qui n'est pas payée à l'heure. PAR MARC-ANTOINE PAQUIN > Frustration, impuissance, décourage- ment… des paramédics de la Coopérative des paramédics du Témiscouata ont vécu un lot d’émotions après avoir été appelés à parcourir près de 60 kilomètres pour intervenir auprès d’un enfant en arrêt car- diorespiratoire, au début du mois de jan- vier. Une situation dramatique qui a cepen- dant mis la lumière sur une réalité qui arrive «trop souvent» dans la région, et qui pourrait pourtant être évitée, dénoncent les syndicats. PHOTO : ANDRÉANNE LEBEL SUITE À LA PAGE 5 > 1153010223 | INFODIMANCHE • ACTUALITÉ Le 11 janvier 2023 4 >
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